Forêt française : repenser les financements

En mai 2024, avec mon collègue Christian Klinger, sénateur du Haut-Rhin, j’ai rendu public un rapport d’information sur la filière forêt-bois. Ces travaux mettent en lumière le décalage croissant entre le montant important des financements publics en jeu, 1,45 milliard d’euros par an et le devenir, de plus en plus incertain, de la forêt française, la 4e forêt européenne. La France est l’un des rares pays au monde à connaître tous les types de climat forestier (forêt tempérée, tropicale, subtropicale mais aussi boréale) au sein desquels cohabitent un très grand nombre d’essences et de biodiversité.

Dans ce contexte, je suis convaincu que nous devons changer radicalement notre approche pour faire de la gestion de nos forêts un atout économique et environnemental. L’objectif de cette évolution doit également être de lutter contre le morcellement de la forêt française qui nuit à l’efficacité des politiques publiques qui y sont conduites. En effet, les trois-quarts de la forêt française hexagonale, environ 12,8 millions d’hectares, appartiennent à des propriétaires privés, le quart restant étant réparti au sein de 17 847 forêts publiques relevant de l’ONF, avec huit types de propriétaires publics différents, principalement les communes.

Je veux évoquer en particulier deux enjeux qui me semblent majeurs pour le secteur :

  • en premier lieu, nous avons besoin de restructurer la filière via une véritable politique nationale d’aides, bien calibrée. Aujourd’hui, environ 15 % des dépenses de la filière sont partiellement estimatives. Mieux identifier le total du financement public et mieux connaitre les caractéristiques de la forêt semblent être des prérequis indispensables pour aider au mieux la filière à contrer les difficultés qui s’imposent à elle. Pour cela, je préconise une simplification des règles de financement existantes et un renforcement de leur conditionnalité écologique ;
  • par ailleurs, alors que le rapport n’en parle que peu car cela ne dépend pas de mon périmètre de rapporteur spécial de la commission des finances, je souhaite évoquer le dispositif dit « Sérot-Monichon » dont la pertinence n’est pas clairement pas avérée. Cet avantage fiscal remonte à 1930 et exonère à hauteur de 75 % le montant des droits de successions et donations entre vifs. Il représente 91 millions d’euros de moindres recettes pour l’État en 2022. Cette « niche » constitue aujourd’hui un outil d’optimisation fiscale sans qu’aucun élément concret ne permette d’affirmer qu’elle est positive pour la gestion et la dynamisation des forêts françaises.

En définitive, ces travaux démontrent, si besoin s’en faut, l’importance de la doctrine fiscale pour un secteur donné. Ma position en la matière est claire. Il faut mieux aider le développement de la forêt française, tant pour des raisons d’aménagement du territoire que de dynamisation économique et de préservation de la biodiversité mais nous ne pouvons plus le faire sur la simple base de régimes fiscaux dérogatoires. Je suis convaincu que la mise en place d’aides ciblées, parfois plus importantes en volume, pour les situations dans lesquelles l’intérêt général, notamment environnemental, est garanti, serait une orientation positive tant pour les finances publiques que pour l’efficacité de nos politiques publiques et la préservation de notre patrimoine vivant.

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