À la veille de l’examen en séance de la première partie du budget de l’année 2025 consacrée aux prévisions de recettes établies par l’actuel gouvernement, Michel Barnier profitait d’une interview au JDD pour dresser ce qu’il érigeait comme ses « lignes rouges ».
Il y alertait en particulier sur la nécessité d’éviter un « concours Lépine fiscal », au sortir d’une première semaine de débats en commission à l’Assemblée nationale close par le rejet par cette dernière d’un projet de budget largement remanié par les divers amendements adoptés.
Cette critique de la voie prise par les travaux parlementaires émerge après l’adoption de divers amendements, majoritairement issus des rangs de la gauche, pérennisant, élargissant ou instaurant des dispositifs sources de hausse de la fiscalité.
Si le Gouvernement fait état de sa volonté de dégager, dans le courant de l’année à venir, 20 milliards d’euros d’augmentation des recettes via des contributions fiscales voulues « exceptionnelles, temporaires et ciblées », ces prévisions s’apparentent davantage à un jeu de dupe qu’à une réelle assurance de maîtrise restaurée de nos finances publiques.
Des trois qualificatifs précédemment énoncés, seul un est réellement sincère ! Exceptionnel. Comment définir autrement les mesures d’austérité comprises au sein de ce PLF 2025 ? Comment caractériser autrement le contexte économico-financier que nous connaissons aujourd’hui ? Comment, enfin, baptiser autrement le manque de volonté politique dont fait preuve l’exécutif ?
À l’heure où l’impératif d’une participation globale, majeure, étendue des contributeurs particuliers et entrepreneuriaux les plus aisés se fait criante, l’augmentation des recettes qui nous est proposée est une nouvelle fois injuste.
Une injustice tant fiscale que sociale illustrée soit par la temporalité intrinsèquement faible de certaines dispositions tel que l’ajustement de la contribution exceptionnelle des hauts revenus (CDHR) ; soit par la faiblesse d’autres comme le démontre le dispositif inefficient de la taxe sur le rachat d’actions (appliquée sur valeur nominale et non boursière) ou encore par l’omission de dispositions qui auraient permis l’évolution progressive d’une société où le taux d’imposition réel des ménages de la classe moyenne est supérieur à celui des 10% les plus riches comme l’a illustré l’économiste Thomas Piketty.
Loin du sérieux budgétaire qu’il revendique pourtant avec force, le Gouvernement insiste sur une ligne néolibérale privilégiant en toute hypocrisie la contraction des dépenses alors que la trajectoire annoncée ne saurait être atteinte.
Ainsi, dans ses projections transmises récemment à la Commission européenne, le Gouvernement table sur une réduction moyenne actuelle de 0,78 points de déficit. Hors période de sortie de crise (2010 – 2011 et 2020 – 2022), une telle réduction n’a jamais été observée depuis le début du siècle, au mieux. Il souhaite le faire en ne mobilisant que pour un tiers environ des recettes nouvelles et acter des baisses de dépenses qui ne sont pas soutenables, comme en atteste la trajectoire des dépenses publiques observées en France sur la même période.
Finalement, on ne peut que conclure que dans une situation budgétaire si particulière, le Gouvernement se caractérise par son irresponsabilité et son hypocrisie, quand les oppositions de gauche incarnent la responsabilité et une forme de discours de vérité, assumant l’inéluctabilité d’une redéfinition fiscale.