C’est tout du moins le sentiment qui a semblé prévaloir en ce début de mois de décembre.
À quelques jours des fêtes de fin d’année, le feuilleton présidentiel poursuit ses maigres scores d’audience malgré la multitude de rebondissements dont cette dernière saison fait pourtant état.
Mais loin de la légèreté caractéristique de ce type de contenus, c’est à une réalité beaucoup moins fantasque que nos concitoyens sont confrontés.
Trois évènements survenus cette même semaine témoignent de la situation inédite et alarmante que connaît aujourd’hui notre pays : censure du gouvernement Barnier ; signature de l’accord commercial unissant les marchés de l’Union Européenne et des pays du Mercosur par Ursula von der Leyen ; visite d’État d’Emmanuel Macron auprès du prince héritier d’Arabie Saoudite … En apparence distincts, ces épisodes renvoient pourtant à la même symbolique : le renforcement latent mais pérenne de la fragilité politico-économique de la France.
Si le sentiment décliniste, leitmotiv de l’idéologie d’extrême-droite, semble globalement fallacieux, la perte d’influence de notre pays dans des secteurs stratégiques notamment commercial, financier, économique mais également diplomatique est difficilement contestable.
Au commencement était… l’incertitude politique
La chute de Michel Barnier, bien que prévisible, reste révélatrice de l’instabilité gouvernementale et politique qui s’institue progressivement. Nourrie par les égarements jupitériens d’une figure présidentielle sourde aux attentes de renouvellement démocratiques de la société française, ce phénomène s’accentue par la polarisation des idées et partis politiques malgré l’absolue nécessité de compromis et d’entente au nom du bien commun.
À l’incertitude politique répond… la crise économique
Déficit public sans précédent, lent processus de désindustrialisation national, modèle économique à bout de souffle, croissance atone, suppressions d’emplois massives dans les filières productives tel Michelin, potentiel retour d’un chômage à 8% courant 2025, souffrance du monde agricole qui reste sans réponses viables… Les fondations de la Maison France s’érodent inexorablement depuis sept ans.
À cela s’ajoute un contexte international où fleurissent des stratégies délétères, allant du protectionnisme américain, avec l’instauration de l’Inflation Reduction Act, à la guerre économique agressive menée par la Chine, via le déploiement de son projet de « Nouvelle route de la soie ». Le poids de la France dans la construction des équilibres et des rapports de force de demain est, pour le moins, en sursis.
En témoigne la conclusion de l’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur par la Commission européenne et cela malgré les oppositions de plusieurs gouvernements européens dont celle déclarée et établie de la France, membre fondateur de l’Union et artisane de la politique agricole commune, PAC, prisme organisateur de nos échanges agricoles.
À la crise économique répond… la faiblesse diplomatique
Comment envisager autrement la visite du président Macron en Arabie Saoudite quand la voix de la France est plus que jamais décriée tant au Moyen-Orient, au vu de ses positions ambivalentes à l’égard du conflit israélo-palestinien, que chez nos anciens partenaires africains, où elle est parfois perçue comme instigatrice d’un néocolonialisme persistant, voire dans l’ensemble de ce qui est désigné par les experts comme le « Sud global ».
Une fois ces éléments actés, que faire ?
Devons-nous simplement les accepter ? Le fatalisme n’a, malheureusement pour certains, jamais fait partie du vocabulaire socialiste. Au contraire, l’actualité est une fenêtre d’opportunité majeure pour la gauche. Elle doit montrer, tant institutionnellement que médiatiquement, que le sentiment d’espérance qu’un autre horizon d’évolution est possible et viable.
Quel est cet horizon d’attente me direz-vous ?
Une approche ambitieuse et solidaire, tournée vers la justice sociale et la transition écologique, qui met l’accent sur l’augmentation des salaires, notamment du SMIC, afin de redonner du pouvoir d’achat aux ménages, moteur essentiel de la consommation et donc de la croissance.
Une relance par la demande qui s’accompagne d’un investissement public massif dans des secteurs clés, tels que les énergies renouvelables, les infrastructures vertes et la rénovation énergétique, pour créer des emplois durables tout en modernisant l’économie.
Une réforme fiscale profonde, qui instaure une plus grande progressivité de l’impôt afin que les plus riches et les grandes entreprises contribuent davantage.
Un protectionnisme commercial raisonné qui vise à soutenir les secteurs stratégiques tout en favorisant les circuits courts et un commerce international plus équitable.
Et les collectivités territoriales, acteurs essentiels de ce changement
Enfin, cet horizon d’attente ne saurait faire abstraction du rôle crucial des collectivités territoriales, qui doivent être des piliers incontournables dans la construction d’un nouveau modèle sociétal.
Ces collectivités, garantes de la proximité et de l’adaptation des politiques publiques aux réalités du terrain, ne peuvent plus être réduites à l’état d’exécutantes, budgétairement étranglées. Leur rôle doit être pleinement réhabilité à travers un pacte clair avec l’État, respectant le principe constitutionnel de décentralisation tout en renforçant leurs moyens financiers et leurs compétences. Il est temps de leur rendre leur capacité d’innovation, qu’il s’agisse de développer des infrastructures locales durables, d’expérimenter de nouvelles approches sociales ou de répondre à l’urgence climatique.
Ce partenariat renouvelé entre État et territoires s’inscrit dans une vision de justice et d’efficacité et constitue un levier indispensable pour faire émerger une France plus solidaire, plus résiliente et plus en phase avec les aspirations de ses citoyens.