Les sénatrices et sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain (SER) se sont abstenus sur le projet de loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. Ils contestent un texte de courte vue et dangereux pour notre système de protection sociale.
Attisée par le contexte international et la crise inflationniste, la baisse du pouvoir d’achat est une préoccupation majeure chez les Français. En réponse, et avec ce projet de loi, le Gouvernement ne propose qu’une boîte à outils fourre-tout qui laisse de côté la question centrale des salaires.
A l’unisson avec la droite sénatoriale, le Gouvernement ne propose que des mesures de court terme qui ne suffiront pas à répondre à l’urgence de la situation sociale en France. C’est notamment le cas de la « prime Macron » qui illustre les faiblesses de ce projet de loi et la philosophie qui l’anime. Les salariés et indépendants doivent pouvoir vivre dignement de leur travail. Or, cette prime est une mesure :
- hypocrite : en moyenne, les primes distribuées par les employeurs étaient jusqu’ici de 500 € alors qu’elles pouvaient atteindre 2000 €. Le relèvement du plafond de la prime à 6000 € n’y changera rien. C’est un leurre.
- facultative : les employeurs ne sont pas contraints de la verser. En 2019, seuls 10% des salariés en ont bénéficié.
- dangereuse pour notre modèle social : avec cette prime désocialisée et défiscalisée, on organise la baisse des recettes de la sécurité sociale et donc, à terme, un affaiblissement de la protection sociale de tous les Français.
- inégalitaire : en substituant les primes aux augmentations de salaires, les travailleurs verront leur progression salariale ralentie et cotiseront moins pour leur retraite. Enfin, cette prime bénéficie en priorité aux hommes.
Les propositions du groupe SER pour valoriser le travail ont été balayées par le Gouvernement : SMIC à 1500€, Grenelle des salaires, revalorisation des prestations sociales au moins au niveau de l’inflation, examen automatique du droit aux prestations sociales par l’administration contre le non-recours, ou encore RSA jeunes.
En outre, alors que l’INSEE table sur une inflation entre 6 et 7% cette année, le texte prévoit de revaloriser les retraites et les prestations de 4% par anticipation. Cela ne permettra pas de compenser la perte de pouvoir d’achat des ménages.
Les mesures visant à contenir les hausses de dépenses de logement pour les locataires les plus modestes (revalorisation anticipée des APL, variation de l’indice de référence des loyers limitée à 3,5) sont ponctuelles et insuffisantes. Elles ne pèsent pas lourd au regard des 12 Mds d’euros économisés dans le quinquennat précédant sur les aides au logement.
De même, pour nécessaires qu’elles soient, les mesures visant à sécuriser l’approvisionnement énergétique en gaz et en électricité (renforcement des obligations des opérateurs de stockage de gaz, extension au gestionnaire de distribution de la possibilité de contractualiser des capacités d’interruptibilité de consommation de gaz,…) ne sont pas à proprement parler des mesures de pouvoir d’achat. Elles révèlent les faiblesses de la politique énergétique du Gouvernement.
Enfin, le relèvement du plafond de l’AREHN de 20 Twh supplémentaires dégradera encore la situation financière d’EDF, au bénéfice de ses concurrents dont les surprofits ont explosé dans la crise. Nous considérons qu’il faudrait une grande réforme du marché européen de l’énergie et, à défaut d’une mise en extinction de l’ARENH, figer son plafond à 100 TWh.
Le groupe SER déplore un texte qui passe à côté de son sujet. Avec ses mesures cyniques ou de portée réduite, il ne répond pas à l’urgence du pouvoir d’achat des Français.